Entre impuissance et « surprenance »

Srs Beauregard et Timmons

Maison de la Parole, 1er novembre 2017 – Le conférencier invité, le réputé Dr Patrick Vinay, a charmé son auditoire par sa science, sa grande humanité et sa bonté. Manifestement, il maîtrise bien le sujet : l’accompagnement en fin de vie.  En dix ans seulement, il a accompagné quelque 5000 personnes en soins palliatifs.  Son propos d’expert est livré tout en fluidité et en poésie.  De la musique aux oreilles de l’âme!

Le Dr Vinay a d’abord partagé une vérité qu’il confesse avoir lui-même mis des années à réaliser : derrière chaque maladie, il y a d’abord et avant tout une ou un malade.  D’où l’importance de ne pas s’occuper que de la maladie mais aussi et surtout de la personne. Ce qui se passe en fin de vie n’est pas juste « un mauvais moment à passer ».  C’est un temps précieux qu’il ne faut pas escamoter.  La personne bien portante pense différemment de la personne malade.

Quand on devient malade, les mécanismes de survie sont débordés.  On doit faire progressivement le deuil de soi-même.  La perte des activités valorisantes s’accompagne d’un sentiment d’inutilité.  La souffrance psychologique et la souffrance relationnelle ne sont pas moins réelles que la souffrance physique.  Le besoin de sens alimente la souffrance existentielle, la peur que sa vie n’ait plus aucun sens. Pire, la peur que sa vie n’ait eu aucun sens : « Ai-je été moi-même? Ai-je donné la priorité aux vraies choses? ».

Sur un lit de mort, les priorités de sa vie sont mises dans un grand tamis. Une fois secoué, le tamis de sa vie ne retient que l’essentiel.  Et ces réalités essentielles ont toutes un nom propre : celui de sa conjointe, de son conjoint, de ses enfants, de ses amis…  La personne en fin de vie recherche un regard positif, un contact vrai avec les siens.  L’espace entre elle et moi est fait de nous deux.  La personne en fin de vie est sensible à « une voix de sa maison », une voix familière qui lui transmet la confiance et le courage. Tous deux, nous sommes égaux devant le mystère de nos vies.

Quand l’équipe soignante réussit à rendre confortable la personne malade, la fin de vie peut être un moment d’opportunité, de découverte, de transformation et de profonde communion;  un moment spirituel.  Nous pouvons alors passer de l’impuissance à ce que le Dr Vinay appelle « la surprenance » : un précieux renouveau dans la relation, un ultime « Je t’aime », une réconciliation célébrée, un pardon offert, une main tendue, une confidence inattendue… En fin de vie, notre impuissance appelle l’intervention de Dieu.  Quand la personne mourante et la personne aidante acceptent leur impuissance réciproque, elles peuvent se mettre en marche l’une avec l’autre.

Cette conférence vivifiante était une initiative de la Maison de la Parole animée par Srs Pierrette Beauregard, Édith Lavoie, Muriel Timmons et Mme Geneviève Boucher.

Luc Benoit
Communications

 

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